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JANVIER

Rone en concert à la Philharmonie de Paris

Flash-back. En 2015, Erwan Castex alias Rone sort son troisième album, Creatures, qui l’inscrit définitivement au panthéon de la musique électronique de notre pays. Enfin, “musique électronique”, l’étiquette est sans doute trop étriquée pour Rone qui a invité sur ce disque de nombreux artistes venus d’horizons différents : Étienne Daho, le chanteur François Marry (Frànçois & The Atlas Mountains), Bryce Dessner, le leader du groupe de rock The National, le violoncelliste Gaspar Claus ou le multi-instrumentiste Bachar Mar-Kahlifé. C’est donc logiquement que Rone en a convié certains le samedi 14 janvier à partager la grande scène de la Philharmonie de Paris, qui s’ouvre ainsi pour la première fois largement à la musique électronique. Un concert événement ponctué de nombreux moments phares. Comme cette introduction tout en fracas stridents élaborés par le trio à cordes Vacarme, dirigé par Gaspar Claus. Si bien entendu François Marry est venu chanter “Quitter la ville”, c’est la performance de l’écrivain de science-fiction Alain Damasio qui a marqué les esprits. Ce proche de Rone s’est livré à une interprétation remuante de la version vocale “Bora”, où il déclame son texte à l’allure de profession de foi d’un artiste exalté et révolté. Un triomphe qui marque aussi la fin d’un cycle pour le producteur. Le 3 novembre 2017, il publie un quatrième album nommé Mirapolis ‑ évidemment sur InFiné, son label historique. Entre-temps le 23 mars, Erwan Castex reçoit la décoration de Chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres.

La chanson française se nourrit d’électronique et vice versa : Flavien Berger, Camille, Yan Wagner, Paradis…

Il y a seulement dix ans, les frontières entre styles musicaux restaient désespérément étanches. Mais les genres se sont décloisonnés au fur et à mesure que l’usage des playlists du streaming a explosé, mixant house, pop ou chanson française. Et c’est bien cette dernière qui incontestablement a tiré son épingle du jeu, ces dernières années. L’album de remixes de morceaux d’Alain Chamfort (2015) par la fine fleur de l’électronique de notre pays (Chloé, Ivan Smagghe, Cardini & Shaw) a été le point de départ d’une vague à l’allure de tsunami. De la même manière, le meilleur titre de l’album Blitz d’Étienne Daho est une collaboration avec Flavien Berger, intitulé “Après le blitz”. Quand à Flavien Berger, ses propres compositions, “Brutalisme” ou “Maddy la nuit”, sont très inspirées par le créateur de “Tombé pour la France”. Des influences et des rencontres qui vont se multiplier dans les deux sens. Si Oui de Camille est une réussite éclatante d’inventivité, elle le doit largement à son utilisation futée de sonorités électroniques qui ont permis à la chanteuse une ouverture vers de nouveaux horizons, comme en témoigne son passage au festival parisien We Love Green. Il faut citer encore Calypso Valois qui confie les clés de son délicieux Cannibale au sorcier de l’électro dark-wave, le Parisien Yann Wagner, ou les ondes démoniaques techno-acides des chansons pop exaltées de Vendredi Sur Mer et son EP intitulé “Marée Basse”. Pour la bromance “chanson-électronique”, la marée est haute et elle n’a toujours pas fini de redescendre.

MARS

10 ANS DE TSUGI

Le magazine Tsugi sort un copieux numéro 100 de 180 pages dédiés aux rencontres, notamment entre musiciens de la scène française (Jacques et Laurent Garnier, Étienne Daho et Flavien Berger) et ouvre les festivités de son dixième anniversaire, qui vont se prolonger avec 24 h non-stop de clubbing (Vitalic, Laurent Garnier…) et de concerts (Paradis, François & the Atlas Mountains…) en avril dans le parc de la Villette. Depuis son lancement, en 2007, le magazine dédié à la scène musicale émergente souvent électronique s’est développé en lançant par exemple une webradio et un site internet (tsugi.fr).

MAI

La Chinerie lance son Festival

Véritable phénomène sur les réseaux sociaux, avec dès sa naissance 15000 membres, La Chinerie regroupe une communauté de passionnés, les chineurs (de house, de rap, de techno) qui adore passer son temps dans les magasins ou les brocantes à la recherche de la perle rare. Ces Lyonnais hyperactifs avaient réussi en mai 2017 à boucler le financement participatif de leur premier festival, entièrement collaboratif et à l’organisation horizontale. Prévu en septembre 2017 à Paris, ce festival d’un nouveau genre avait dû être reporté au mois de juin 2018 aux puces du canal de Villeurbanne près de Lyon. Annulé pour raisons de sécurité, le festival a mué en trois jours de fête dans divers lieux de l’agglomération lyonnaise. En espérant que la prochaine tentative soit la bonne.

JUIN

PARAdis, le succès live

C’est une forme de consécration pour le duo house-chanson Paradis, formé par Pierre Rousseau et Simon Mény. Un an après la sortie de son premier album Recto-Verso, Paradis fait hurler la prestigieuse salle de concert de la Cigale à Paris, remplie à ras bord. Depuis quelques mois, les deux complices jouent avec succès dans toute la France le mélange de chansons française et d’électronique qu’ils avaient commencé en 2011 avec leur reprise de “La ballade de Jim” d’Alain Souchon.

SEPTEMBRE

Jeremy Underground
et le “saunagate”

Le 13 septembre, le club Abstrakt, situé à Édimbourg, annonce sur Facebook l’annulation de la venue de Jeremy Underground le samedi suivant. La raison ? Les demandes incongrues assorties de menace du booker du DJ, qui exige un hôtel quatre étoiles avec gym et sauna (à plus de 400 euros la nuit), après avoir refusé deux autres hôtels, qu’Abstrakt ne peut pas se permettre de payer. S’ensuit une avalanche de commentaires désagréables sur les réseaux sociaux à l’encontre du jeune DJ house, étoile montante de la scène house française, qui va devenir à son corps défendant le symbole des excès des DJs et de leur entourage. L’affaire est rapidement connue sous le nom de “saunagate”. Heureusement, l’histoire s’est bien finie et Jeremy Underground a fini par jouer pour Abstrakt à l’occasion d’une soirée caritative.

Octobre

Laurent Garnier, légion d'honneur et 30 ans de carrière

C’est au Rex Club, qu’il aime comme sa maison, que Laurent Garnier fête ses 30 ans de carrière. En effet, comme il l’a souvent raconté, c’est le 7 octobre 1987 alors qu’il avait 19 ans, qu’il est passé pour la première fois derrière les platines de manière professionnelle. C’était à l’occasion d’une soirée Zumba à l’Haçienda de Manchester, le club financé par le label Factory et le groupe New Order, qu’il a mixé de 21h à 2h du matin, car les lois anglaises de l’époque obligeaient les clubs à fermer tôt. Et c’est sous le nom de DJ Pedro qu’il s’est produit, puisque Zumba était censée être une soirée espagnole. Depuis, il est devenu l’ambassadeur de la musique électronique française et le DJ préféré de notre pays. C’est aussi le DJ le plus médaillé de France, comme le fait remarquer le quotidien Libération qui lui consacre un long entretien dans ses pages (le 7 octobre 2017), puisqu’après avoir obtenu deux grades des Arts et Lettres, il a été fait Chevalier de la Légion d’honneur par le président Hollande. C’est Jack Lang, éternel ministre de la Culture et protecteur de la techno parade française, qui lui a accroché la médaille lors d’une cérémonie privée dans le Sud de la France où vit le DJ. Et quand on est DJ depuis 30 ans, est-ce qu’on ne se retrouve pas souvent à jouer devant un public qui a l’âge de ses enfants, comme lui demande Libération ? “Quand je joue, j’attire toujours un public assez mélangé. Quant à jouer devant des gens qui ont l’âge de mes enfants, je le vivrais bien tant que je ne ressemblerai pas à un vieux juke-box poussiéreux. J’ai demandé à mes potes de me prévenir quand je serai aussi pathétique que certains groupes de rock. Je ne veux pas attirer uniquement un public de nostalgiques.”

Renaud gay, disparition d'un pionnier du son "free"

C’est au sein de l’organisation du club Concrete que certains avaient connu Renaud Gay, qui y occupait le poste de responsable de la production artistique. Mais les plus anciens se souvenaient surtout de ce garçon d’une extrême gentillesse comme le fondateur du label Expressillon. Disparu des suites d’un cancer, Renaud Gay était celui par qui le son des Britanniques Spiral Tribe, qu’il avait découverts en 1992, était parvenu jusqu’à nous. Grâce à Renaud et son label, 69DB, Crystal Distortion ou encore Ixy, tous membres des “Spi”, avaient pu publier leurs productions. Véritable passeur, Renaud avait permis à toute une génération de musiciens techno, hardcore ou breakbeat de s’épanouir.

Novembre

The hacker, héros électro-techno

Inlassable défenseur d’une électro-techno entêtante et martiale, le Grenoblois Michel Amato, alias The Hacker, fait des infidélités à son label Zone. Son quatrième album « Le Théâtre des Opérations », baptisé d’après le journal métaphysique de l’écrivain Maurice G Dantec, est publié sur le label de San Francisco Dark Entries. Pourtant, même s’il change de label, The Hacker ne dévie pas de sa ligne sombre pour ces huit titres qui confirment sa maîtrise des synthés analogiques. Un album instrumental impressionnant de maîtrise, où sa complice de toujours Miss Kittin pose sa voix sur “Time X” (hommage à la mythique émission de science-fiction « Temps X »).

Folamour, la nouvelle génération house

Qui aurait cru il y a seulement dix ans qu’une nouvelle scène house, à la richesse incroyable, apparaîtrait encore en France ? Au premier rang de cette jeune génération de producteurs et de DJs, biberonnés au funk, au groove et au disco, le Lyonnais Bruno Boumendil, alias Folamour, qui, après d’étonnants maxis, publie un excellent premier album, UMAMI, sur son label Moonrise Hill Material en collaboration avec la prestigieuse maison anglaise Classic Music Company. Du premier au dernier titre, un sans-faute.